Née dans les années 77 à Ziguinchor, je n’avais aucune chance d’échapper a l’excision, c’était un must point final.
Et je trouve amusant quand j’y pense qu’il arrivait que tu souhaites passer cette épreuve car synonyme d’acceptation dans la cour des grandes, les jeux entres petites filles étaient toujours dirigés par des aînées et tu t’entendais dire “tu es souillée”, quand il fallait prendre le bain ensemble après avoir mouillés nos habits sous la pluie, tu voyais la porte des toilettes fermées sous ton nez car tu n’as pas encore séjourné dans “la chambre du respect” au delà de l’acte, elle servait à façonner l’éducation des petites filles axés sur le respect fondamental des parents et des aînés, malheur à celles qui étaient connus têtes de mules.
Ma grand-mère, paix à son âme, me fît exciser, bien que n’ayant jamais était à l’école, elle mettait un trait d’honneur à ce que j’aille à l’école tous les matins et le soir que j’apprenne mes leçons et fasse mes devoirs, je peux pas en vouloir à cette femme car si elle était de notre époque, elle n’aurait pas toléré telle pratique, elle ne savait pas et personne ne savait dans les années 83 il n’ y avait aucune sensibilisation sur l’excision et ses conséquences.
J’avais 6 ans, un matin dame l’exciseuse (je me demande si le terme est correct) arriva à la maison et certaines de mes camarades de jeux du quartier furent amenées et nous voilà devenues “acceptables “ car au-delà de la douleur, nous étions aussi habitées par un sentiment de fierté, ignorantes et innocentes.
Aujourd’hui mon témoignage veut lever la voile sur ces vérités passes partout comme quoi la femme excisée est frigide.
Certes nous avons eu à subir une injustice qui a tout égard est handicapant, je n’ai jamais pu accepter le cunnilingus, cette partie de mon corps est la seule qui me fasse sentir mal dans ma peau car incomplète à mes yeux mais j’ai combattue pour qu’elle n’inhibe pas la femme que je veux être, celle là même qui peut jouir d’une sexualité épanouie, qui peut donner du plaisir et en avoir.
La sexualité requiert un apprentissage, elle ne saurait passer sans l’apprentissage de notre propre corps et son acceptation, de me rendre à l’évidence que mon plaisir doit passer par un autre organe que le clitoris, on aura fait un pas. Nombreux sont celles qui se créent un obstacle “j’ai été excisée, je peux pas avoir du plaisir “.
Mesdames j’ai eu à côtoyer des amies qui n’ont pas été excisées mais ne savent pas c’est quoi avoir de l’orgasme, j’en ferai pas une généralité mais il y a lieu de se poser des questions.
Aujourd’hui je me suis mariée, mère de famille,si j’ai pu gagner cette confiance en moi en refusant très fort que ce chapitre sombre de mon enfance puisse ternir ma vie de femme adulte, celle la même qui me définie, c’est un choix.
Un soir après 6 mois de mariage, je demande à mon mari “tu as déjà fait l’amour à une femme excisée” il me répondît je vais la trouver où?…
j’avoue que je garde secret cette parenthèse de mon enfance, c’est juste pour vous dire combien on peut changer un obstacle en une force et la finalité est l’épanouissement.
Loin de moi l’idée de donner du crédit à ces pratiques, je les vomis au plus profond de mon être, j’ai des filles et j’ai été claire avec ma famille, même ma propre maman je n’hésiterai pas à la traîner en justice..
Notre bonheur si minime soit-il dépend de nous, allons à sa recherche.
Anonyme
Terrible témoignage …
Petite contribution à cet article, plasticienne engagée, j’ai réalisé une oeuvre sur le sujet des mutilations sexuelles intitulée « Infibulation », que j’ai pu présenter à 400 lycéens français pour la Journée des Femmes 2018. Le dialogue fut incroyable avec des élèves qui découvraient cette pratique barbare.
Quand l’art permet de parler directement des MGF et d’ouvrir le débat.
A découvrir : https://1011-art.blogspot.fr/p/blog-page.html
Mais aussi une oeuvre plus pudique intitulée « Noli me tangere » sur l’inviolabilité du corps de la femme : https://1011-art.blogspot.fr/p/noli-me-tangere.html